Notre histoire

La rue du Petit-Champlain, datant de la première colonisation, occupe une place de premier rang dans l’histoire de la Nouvelle-France. En effet, elle est considérée comme la plus ancienne artère commerciale en Amérique du Nord.

Au XVII^e siècle, ce qui n'était qu'un sentier menant à la fontaine de Champlain se transforme en 1688 en une rue appelée la « rue des Meulles ». En 1792, cette rue est recensée sous le nom de « rue Champlain », puis en 1874, elle est cartographiée sous le nom de « Petite rue Champlain » pour éviter toute confusion avec la Grande rue Champlain.

Pêcheurs, débardeurs et ouvriers des chantiers maritimes adoptent la rue et y construisent leur maison. Entre 1725 et 1760, toutes les maisons doivent être reconstruites en pierre afin de prévenir les incendies. Par la suite, dans les années 1770, on construit un escalier de bois au bout de la rue pour faciliter l’accès de la Basse-Ville à la Haute-Ville. Vers 1830, ce quartier, aux maisons bien entretenues et joliment décorées, devient très prisé.

Pendant tout le XIX^e siècle, la rue devient le refuge des familles ouvrières irlandaises, qui travaillent au port et dans la construction navale. Cependant, au XX^e siècle, les activités fluviales accusent une baisse importante, et les habitants du quartier s’appauvrissent.

En 1960, les rues se trouvent dans un état lamentable. On recouvre alors les maisons de tôle, afin de cacher les pierres délabrées. Outre les quelques résidents qui ont décidé de rester, les personnes de l’extérieur évitent ce quartier pauvre et marginalisé. Néanmoins, de petits artisans décident d’y installer leur atelier en raison du faible coût des loyers.

À cette époque, dans le secteur de l’immobilier, on réalise principalement des projets de démolition et de modernisation afin de restaurer l’aspect d’origine des immeubles transformés durant l'occupation anglaise. Ainsi, on prévoit de grandes intentions pour Place-Royale nécessitant une reconstruction massive selon les méthodes et l’esthétique de la Nouvelle-France. Le projet initial planifie même la démolition des immeubles de la rue du Petit-Champlain afin de créer un stationnement pour Place-Royale, pour faire de cette dernière un musée à ciel ouvert. Cependant, c'est à ce moment que Jacques de Blois et Gerry Paris entrent en jeu avec un grand rêve en tête.

Jacques de Blois, architecte, et Gerry Paris, homme d’affaires nourrissent le rêve de revitaliser un îlot de maisons en s'inspirant des projets de restauration immobilière observés en Europe. Une poignée de main leur suffit pour lancer officiellement le début des recherches. Quelque temps après, en passant par le boulevard Champlain, Jacques de Blois remarque le quartier et en saisit tout le potentiel. Ce visionnaire s’imagine des familles, des artisans, des restaurants, des commerces dans cet environnement revitalisé.

Leur aventure commence donc le 16 octobre 1976. Ils achètent quelques immeubles du quartier pour leur faire subir une cure de rajeunissement. En 1982, ils souhaitent acquérir d’autres immeubles, mais n’ont pas assez de liquidités. Heureusement, la SODIC, aujourd’hui la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) accepte de participer au projet, et reçoit 51 % des parts.

Les deux idéalistes achètent 25 édifices et commencent par les rendre conformes aux normes de sécurité. Leur approche novatrice consiste à préserver l’aspect d’origine des immeubles tout en réutilisant un maximum d’éléments existants. Ils vont même jusqu'à recycler des objets trouvés au dépotoir municipal. Par cette démarche avant-gardiste, ils font naître le premier écoquartier de Québec, créant ainsi un espace unique et magnifique : le Quartier Petit Champlain.

Le projet n’est pas sans embûche, car le quartier est dans un piètre état : l’édifice de l’ancienne Dominion Corset, sans toit, est couvert de fientes d’oiseaux sur quatre étages et le théâtre est presque démoli. Par ailleurs, Jacques de Blois et Gerry Paris, les artisans, commerçants et résidents du quartier décident de sortir leurs chaises pour bloquer le boulevard Champlain et demander à la Ville de Québec d’élargir les trottoirs. Au grand plaisir de tous, ils réussissent à obtenir gain de cause, ce qui permet notamment la construction de la terrasse du Cochon Dingue. Ainsi, graduellement, leurs nombreuses actions donnent un nouveau souffle au quartier. Petit à petit, les fenêtres originalement barricadées au rez-de-chaussée font place à de magnifiques vitrines.

Les rues s’animent avec l’arrivée de nouveaux artistes et artisans insufflant de belles couleurs au quartier. Ces couleurs deviennent la signature du Petit Champlain, s’inspirant du quartier Soho à New York connu pour sa créativité et son expression artistique.

Le Théâtre Petit Champlain représente l’un des récents projets qui enrichissent l’offre culturelle. Il met en vedette divers artistes locaux et internationaux, et contribue ainsi à accroître la visibilité du quartier. Jacques de Blois et Gerry Paris rêvent également de créer un parc, mais ce projet n’est pas sans défis. Ils doivent négocier longuement avec le propriétaire, ainsi qu’avec la Ville de Québec pour faire raser un immense entrepôt abandonné et vétuste, qui sera métamorphosé en l’actuel parc Félix-Leclerc. Cet emplacement devient un espace lumineux, un îlot de verdure, un lieu de rassemblement. Dans les années 80, les gens du quartier s'y rassemblent et y jouent notamment à la pétanque.

Après plus de neuf ans d’efforts soutenus, ce projet ambitieux de restauration est finalement mené à bien. On peut dire que les deux visionnaires y ont mis tout leur cœur.

Jacques de Blois et Gerry Paris désirant se retirer pour des raisons de santé, décident de vendre le parc immobilier tout en assurant sa pérennité. En 1985, des investisseurs américains manifestent leur intérêt pour acquérir les immeubles, mais les actionnaires préfèrent laisser le patrimoine aux mains de gens d'ici. C’est alors que des artisans et commerçants du quartier s’unissent pour acheter le parc immobilier.

Le 25 novembre 1985 marque un tournant décisif dans l’histoire du Petit Champlain : les commerçants et artisans signent la charte qui donnera naissance à « La Coopérative des artisans et commerçants du Quartier Petit Champlain ». Grâce à l’appui financier de la Société de développement des coopératives (SDC), de la Mutuelle des fonctionnaires et de Desjardins, la Coopérative parvient à acquérir le parc immobilier, permettant ainsi à ses membres de devenir copropriétaires. Cette initiative engagée permet non seulement de protéger le patrimoine du Quartier Petit Champlain, mais aussi de soigneusement sélectionner les commerces qui s'y établissent. Aujourd’hui, ils sont les fiers gardiens de ce joyau véritablement exceptionnel.

En 1985, le quartier brille déjà par son cachet et son approche novatrice en matière de restauration. Le « grand rêve du Petit Champlain » se concrétise, s'émancipe et se fait connaître. Un conseil d'administration composé de commerçants passionnés supervise l’initiative, tandis qu’une équipe administrative gère la préservation de ce patrimoine. Cependant, en 1987, la Coopérative se heurte à des difficultés financières. Heureusement, la SDC offre une personne-ressource qui parvient à redresser habilement la situation.

La Coopérative ayant retrouvé sa santé financière, joue encore aujourd'hui le rôle de gestionnaire du parc immobilier, tout en veillant au développement commercial du quartier.  Elle peut ainsi contrôler son environnement, notamment en établissant les prix des loyers et en gérant la diversité des produits, en plus d'investir en développement. Ce double rôle s'avère une force inestimable dont jouissent peu d'artères commerciales.

Au fil du temps, de nombreuses initiatives ont été mises en œuvre. Les immeubles ont été rénovés de manière spectaculaire, tandis que la promotion du quartier bat son plein. Depuis près de 40 ans, des efforts colossaux ont été déployés pour assurer la pérennité, la notoriété et le développement du Quartier Petit Champlain.

Le Quartier a progressivement évolué pour devenir ce qu'il est aujourd'hui, attirant des visiteurs du monde entier. C’est aussi une immense source de fierté pour les résidents de Québec. D'ailleurs, les commerçants prennent toujours soin de choisir chaque commerce s'établissant dans les locaux de la Coopérative. Certains membres fondateurs jouent un rôle actif dans le quartier depuis plus de 35 ans. D’autres ont passé le flambeau à leurs enfants ou petits-enfants. Bien sûr, la venue de nouveaux arrivants apporte une valeur ajoutée en matière de diversité culturelle et d’offre commerciale au quartier.

Lieu de prédilection pour les résidents de Québec, ainsi que pour les visiteurs étrangers, le Quartier Petit Champlain attire chaque année plus de 2 millions de personnes. Les commerçants sont toujours copropriétaires du parc immobilier qui compte maintenant 29 immeubles.

La Coopérative connaît aujourd’hui un succès remarquable. Elle fournit des locaux et des services à ses membres pour qu’ils puissent exploiter leur entreprise. Elle veille également à l'entretien et à la location d'une quarantaine de logements résidentiels. Reconnue par la Ville de Québec en tant que regroupement de gens d’affaires, la Coopérative reçoit du soutien pour animer, décorer et promouvoir le Petit Champlain et Place-Royale, contribuant ainsi à le dynamiser davantage. Le Quartier Petit Champlain est un lieu de vie animé, réputé pour ses commerces originaux, son charme, son authenticité et ses activités socio-culturelles en toutes saisons.

Encore aujourd’hui, ce lieu demeure un véritable centre névralgique pour les esprits créatifs et audacieux. Avec plus de 40 commerces ouverts toute l'année, il offre une profusion de trouvailles originales, dont de nombreux produits québécois. De plus, il offre une expérience culinaire et culturelle sans pareille. Clients, résidents, entrepreneurs et travailleurs s'y côtoient quotidiennement, formant ainsi un petit village animé au cœur de la ville.

« Tant qu’il va avoir la chaleur humaine que l’on a, je pense que le quartier va rester vivant. »

- Juan Hernandez, membre fondateur et premier propriétaire de la boutique Ibiza, qui avait signé le tout premier bail commercial de la Coopérative en 1985.